Journée Calme
le 8 Juin : A partir de Minuit bombardement
violent, gaz et fusant. Nos batteries répondent. A 5h½ Gauguin prend le
sondage. Je dors un peu malgré le masque.
A 7 heures : 1 avion : "Rien
à signaler."
A 8 heures ordre de départ.
Bousculade. On campe dans un champ. File
de chariots, chevaux bariolés. Cidre, poules et lapins d'une ferme vide—
Le bombardement a duré environ
6 heures?
10 Juin : Campons du côté d'Estrée. Un
départ de tanks : La grande boîte hermétique camouflée comme un marbre de
charcuterie et derrière, les A. S. dans leur ciré noir où s'écartèle le
baudrier de cuir jaune, et, au flanc, le couteau du nettoyeur de tranchée.
11 : Le convoi s’arrête, on ne sait plus
où aller. Nous croisons des émigrés. A Houdencourt
DACTYLOGRAPHIE
Mousqueton
83187
12 : On nous réunit : Discours du colonel
: "Cette nuit du 8 au 9 et cette fameuse journée du 9, vous
avez été admirables, etc. ….”
----------
----------
16 : Dimanche. Eté communier à Chevrières.
Beaux vitraux datés 1545.
Eté à Longueil-Ste Marie.
Eté à Grandfresnoy. Eglise : Beau portail
François 1er. 2 statues bois peint : une Trinité—un évêque bénissant.
A Sacy-le-Petit.
DACTYLOGRAPHIE.
CHIFFRES MATHEMATIQUES
A contre-lumière, l'évêque, sa main rouge
élevée, bénit.
Le jour moire de reflets mauves sa face
paisible de vache, qu'allonge l'or de la mitre et qui se perd, avec
le corps taillé dru, sous l'évasement de la belle chasuble grenat,
écartelée d'or, engrénelée d'or.
Aux flancs étroits, les genoux clos,
les jambes jumelles, il siège sous un portail antique et deux bouches
ailées soufflent sur lui les volutes de l'Esprit. (Grd. Fresnoy)
|
A plein jour, épaisse de l'épaisseur
d'une planche de chêne, la Sainte témoigne son martyr, à droite la
roue, et, dans la paume senestre, la palme.
Elle est toute gauche, noyée sous le
friselis monotone d'une robe unie, les hanches étriquées, les jambes
invisibles et deux pieds de face, surgissant de toute la largeur de
leurs dix doigts alignés.
Sur le tout (le nez rapporté en triangle)
une figure d'oeuf, coloriée d'une bouche sérieuse et d'yeux unis en
huit, d'un gros blanc où s'effarent de rondes prunelles mates.
La Sainte témoigne tout ensemble sa souffrance
(avec cette roue endentée et cette palme vert meuble) et également
sa gloire, toutes plaies engrangées maintenant aux plis de la tunique
céleste, bleue et jaune, qu'exaspère encore le vert tendre du socle
et le rouge manteau; la béatitude peinte de sa Face trop piètre s’encaque
entre les bandeaux roux d'une chevelure flottante.
Elle regarde droit en Elle, sans se soucier
des spectateurs, non plus que des raies acerbes qui lacérèrent, une
à une, ses chairs, offrant, large ouvert en sa dextre, le Livre de
sagesse qu'elle médite.
(Sacy-le-Petit.
16 Juin)
|
Le
St Sébastien de Sézanne
D'une
souplesse lâche, qu'ombre cette pâleur des races finies, le jeune
vierge s'éhanche, antique, sous la bure lourde qui plie aux genoux,
et casse au socle. Les lacs païens contraignent ses reins et coudes,
les bras invisibles au dos. Qu'a-t-il souci de bras; Sa mort triomphe.
Quiet,
il la signifie, en ses plaies où colle la coulle, comme des bouches
rouges ouvertes témoignent. Siècles sur siècles, les voici vides
de pennes (et l'instrument ne s'efface-t-il pas).
mais
elles sont toujours du rouge qui est symbole de Charité.
"Voyez
la douleur éphémère, et ma gloire pérenne."
Ecoute
la Face close et penchante, aux cheveux ras d'enfant, rire du rire
d'amour (telle l'aubépine) éclose aux crocs des plaies.
|
17. A Avrigny. Sacy-le-Grand près d'un parc d'aviation.
Un aéro en ex-voto dans la nef.
Savon 18 sous.
Pâté 24 "
fromage 35 s
St Pierre délivré.
Ange : ailes lilas. robe vert pâle—
St : rouge bleu jaune. nuit bleu
chapiteau or. écusson jaune et rouge.
Au
coin, un cierge veille. D'entre la nuit bleue, l'ange s'est montré.
Or,
il est proche, maintenant, les pennes lilas émergés hors la robe pistache
que la main chaste noue au ventre.
Saint
Pierre, fardé d'oripeaux rouges et bleus, le nimbe jaune et la barbe
pisseuse, de sa plante callue, foule les dalles. Il renie la puissance
païenne dont l'or barbare éclate aux chapiteaux des voûtes.
Routier
il va (de fers en fers) jusqu’enfin son crâne éclate au flux sanguin,
quand lié en croix, il meurt, ses pieds bleus et joints, roidis vers
le ciel.
“Comment
l'ange délivra St Pierre de prison”
Vitrail
de Chevrières 1545
|
Ecole de T.S.F. au C.P.A. S.P. 111
25 Juin. A pied de Houdancourt, par Grandfresnoy
et Arsy, arrivé à Rémy.
Pas mal d'effondrements etc.
par bombes.
Coucher dans 1 grange.
La ville évacuée depuis 15 jours. fenêtres
et portes forcées. A l'intérieur des maisons : Armoires, commodes tous
battants ouverts, tiroirs tombés. A terre : émiettement de papiers, cuivres,
faïences, chapeaux, chaussures, linge.
28. De Rémy j. notre nouveau P. C. : 2
maisons de garde-barrière : Ds l'une les officiers et ordonnances. Ds l'autre
téléphone et T. S. F. joli pays. fleurs et blés. Nous sommes à l'alignement
des saucisses. derrière Moyenne Ville.
Bibliographie