Charlot a écrit ces court poèmes ecphrastiques peu après la Bataille du Matz. Pour en savoir plus sur les poèmes et leur contexte, voir son “Journal autour de la Bataille du Matz” dans Textes Français, publié sur le site Web par la Fondation Jean Charlot. Le manuscrit contient les poèmes par ordre de composition : Bois Taillé…, Sainte Barbe, Le St Sébastien de Sézanne (tous trois datés du 16 juin 1918), et Comment l’Ange… (daté du 17 juin 1918). Nous avons conservé le même ordre ci-dessous.
Charlot a copié les poèmes avec quelques changements dans un cahier marqué d’un trait rouge à gauche, cahier connu sous le nom de Red Line Notebook. Il a probablement fait cela en 1920, quand il était encore en France.
Finalement, Charlot a publié les poèmes dans Mele : Bois taillé et peint. Eglise de Grand Fresnoy. Juin 1918, numéro 10, novembre 1968, page 20; Sainte Barbe, numéro 14, avril 1970, page 6; Le St Sebastien de Sézanne, numéro 11, mars 1969, page 7; et “Comment l’ange délivra St. Pierre de prison”, Vitrail de Chevrières. 1545, numéro 10, novembre 1968, page 20. Nous avons reproduit ces poèmes avec de légères corrections. Pour la dernière version de Sainte Barbe, nous avons aussi consulté en priorité le manuscrit dactylographié préparé pour Mele.
[Bois Taillé…]
A contre-lumière, l'évêque, sa main rouge élevée, bénit.
Le jour moire de reflets mauves sa face paisible de vache, qu'allonge l'or de la mitre et qui se perd, avec le corps taillé dru, sous l'évasement de la belle chasuble grenat, écartelée d'or, engrénelée d'or.
Aux flancs étroits, les genoux clos, les jambes jumelles, il siège sous un portail antique et deux bouches ailées soufflent sur lui les volutes de l'Esprit. (Grd. Fresnoy)
[Sainte Barbe]
A plein jour, épaisse de l'épaisseur d'une planche de chêne, la Sainte témoigne son martyr, à droite la roue, et, dans la paume senestre, la palme.
Elle est toute gauche, noyée sous le friselis monotone d'une robe unie, les hanches étriquées, les jambes invisibles et deux pieds de face, surgissant de toute la largeur de leurs dix doigts alignés.
Sur le tout (le nez rapporté en triangle) une figure d'œuf, coloriée d'une bouche sérieuse et d'yeux unis en huit, d'un gros blanc où s'effarent de rondes prunelles mates.
La Sainte témoigne tout ensemble sa souffrance (avec cette roue endentée et cette palme vert meuble) et également sa gloire, toutes plaies engrangées maintenant aux plis de la tunique céleste, bleue et jaune, qu'exaspère encore le vert tendre du socle et le rouge manteau; la béatitude peinte de sa Face trop piètre s’encaque entre les bandeaux roux d'une chevelure flottante.
Elle regarde droit en Elle, sans se soucier des spectateurs, non plus que des raies acerbes qui lacérèrent, une à une, ses chairs, offrant, large ouvert en sa dextre, le Livre de sagesse qu'elle médite.
(Sacy-le-Petit. 16 Juin)
Le St Sébastien de Sézanne
D'une souplesse lâche, qu'ombre cette pâleur des races finies, le jeune vierge s'éhanche, antique, sous la bure lourde qui plie aux genoux, et casse au socle. Les lacs païens contraignent ses reins et coudes, les bras invisibles au dos. Qu'a-t-il souci de bras; Sa mort triomphe.
Quiet, il la signifie, en ses plaies où colle la coulle, comme des bouches rouges ouvertes témoignent. Siècles sur siècles, les voici vides de pennes (et l'instrument ne s'efface-t-il pas).
mais elles sont toujours du rouge qui est symbole de Charité.
"Voyez la douleur éphémère, et ma gloire pérenne."
Ecoute la Face close et penchante, aux cheveux ras d'enfant, rire du rire d'amour (telle l'aubépine) éclose aux crocs des plaies.
[Comment l’Ange…]
Au coin, un cierge veille. D'entre la nuit bleue, l'ange s'est montré.
Or, il est proche, maintenant, les pennes lilas émergés hors la robe pistache que la main chaste noue au ventre.
Saint Pierre, fardé d'oripeaux rouges et bleus, le nimbe jaune et la barbe pisseuse, de sa plante callue, foule les dalles. Il renie la puissance païenne dont l'or barbare éclate aux chapiteaux des voûtes.
Routier il va (de fers en fers) jusqu’enfin son crâne éclate au flux sanguin, quand lié en croix, il meurt, ses pieds bleus et joints, roidis vers le ciel.
“Comment l'ange délivra St Pierre de prison”
Vitrail de Chevrières 1545
[Bois Taillé…]
Copie (fait à Houdancourt) Juin 18.
A contre lumière, l'évêqué, sa main rouge élevée, bénit. Le jour moire de reflets mauves sa face paisible de vache, qu'allonge l'or de la mitre et qui se perd, avec le corps taillé dru, sous l'évasement de la belle chasuble grenat, écartelée d'or. engrênelée d'or.
Aux flancs étroits, les genoux clos, les jambes jumelles, il siège sous un portail antique et deux bouches ailées soufflent sur lui les volutes de l'Esprit
(bois taillé et peint.
Eglise de Grd Fresnoy.)
[Sainte Barbe]
A plein jour, épaisse de l'épaisseur d'une planche de chêne, la Sainte témoigne son martyr, à droite la roue, et, dans la paume sénestre, la palme.
Elle est toute gauche, noyée sous le friselis monotone d'une robe unie, les hanches étriquées, les jambes invisibles et deux pieds de face, surgissant de toute la largeur de leurs dix doigts alignés.
Sur le tout (le nez rapporté en triangle) une figure d'œuf, coloriée d'une bouche sérieuse et d'yeux unis en 8, d'un gros blanc où s'effarent de rondes prunelles mates.
La Sainte témoigne tout ensemble sa souffrance (avec cette roue endentée et cette palme vert meuble)
et également sa gloire, toutes plaies engrangées maintenant aux plis de la tunique céleste, bleue et jaune, qu'exaspère encore le vert tendre du socle et le rouge manteau.
la béatitude peinte de la Face trop piètre s’encaque entre les bandeaux roux d'une chevelure flottante.
Elle regarde droit en Elle, sans se soucier des spectateurs, non plus que des rais acerbes qui lacérèrent, une à une, ses chairs, offrant, large ouvert en sa dextre, le livre de sagesse qu'Elle médite.
(Sacy-le-Petit. 16 Juin.)
Le St Sebastien de Sézanne
D'une souplesse lâche qu'ombre cette pâleur des races finies, le jeune vierge s'éhanche, antique, sous la bure lourde qui plie aux genoux, et casse au socle. Les lacs païens contraignent ses reins et coudes, les bras invisibles au dos.
Qu'-a-t-il souci de bras ; sa mort triomphe. Quiet il la signifie, en ces plaies où colle la coulle, comme des bouches rouges ouvertes témoignent.
Siècles sur siècles, les voici vides de pennes (et l'instrument ne s'efface-t-il pas) mais elles sont toujours du rouge qui est symbole de Charité.
"Voyez la[1] douleur éphémère, et ma Gloire pérenne."
Ecoute la Face close et penchante, aux cheveux ras d'enfant, rire du rire d'amour (telle l'aubépine)
éclose aux crocs des plaies.
“Comment l’ange délivra St Pierre de prison”
Au coin, un cierge veille. D'entre la nuit bleue, l'ange s'est montré. Or, il est proche, maintenant, les pennes lilas émergés hors la robe pistache que la main chaste noue au ventre.
Saint Pierre, fardé d'oripeaux rouges et bleus, le nimbe jaune et la barbe pisseuse, de sa plante callue foule les dalles.
Il renie la puissance païenne dont l'or barbare éclate aux pilastres des voûtes.
Routier il va (de fers en fers) jusqu'enfin son crâne au flux sanguin, éclate ! Quand lié en croix, il meurt, ses pieds, bleus et joints, roidis vers le Ciel.
Vitrail de Chevrières. 1545.
A contre lumière, l'évêque, sa main rouge élevée, bénit.
Le jour moire de reflets mauves sa face paisible de vache qu'allonge l'or de la mitre, et qui se perd, avec le corps taillé dru, sous l'évasement de la belle chasuble grenat, écartelée d'or, engrênelée d'or.
Aux flancs étroits, les genoux clos, les jambes jumelles, il siège sous un portail antique et deux bouches ailées soufflent sur lui les volutes de l'Esprit.
A plein jour, épaisse de l'épaisseur d'une planche de chêne, la Sainte témoigne son martyr, à droite la roue, et dans la paume sénestre, la palme.
Elle est toute gauche, noyée sous le friselis monotone d'une robe unie, les hanches étriquées, les jambes invisibles et deux pieds de face, surgissant de toute la largeur de leurs dix doigts alignés.
Sur le tout (le nez rapporté en triangle) une figure d'œuf, coloriée d'une bouche sérieuse et d'yeux unis en 8, d'un gros blanc où s'effarent de rondes prunelles mates.
La Sainte témoigne tout ensemble sa souffrance (avec cette roue endentée et cette palme vert meuble) et également sa gloire, toutes plaies engrangées maintenant aux plis de la tunique céleste, bleue et jaune, qu'exaspère encore le vert tendre du socle et le rouge manteau.
La béatitude peinte de la face trop piètre s’encaque entre les bandeaux roux d'une chevelure flottante.
Elle regarde droit en Elle, sans se soucier des spectateurs, non plus que des rais acerbes qui lacérèrent, une à une, ses chairs, offrant, large ouvert en sa dextre, le livre de sagesse qu'elle médite.
Sacy-le-Petit. 16 Juin
D'une souplesse lâche qu'ombre cette pâleur des races finies, le jeune vierge s'éhanche, antique, sous la bure lourde qui plie aux genoux, et casse au socle. Les lacs païens contraignent ses reins et coudes, les bras invisibles au dos.
Qu'a-t-il souci de bras; sa mort triomphe. Quiet il la signifie en ses plaies où colle la coulle, comme des bouches rouges ouvertes témoignent.
Siècles sur siècles, les voici vides de pennes (et l'instrument ne s'efface-t-il pas) mais elles sont toujours du rouge qui est symbole de Charité.
"Voyez ma douleur éphémère, et ma Gloire pérenne." Ecoute la Face close et penchante, aux cheveux ras d'enfant, rire du rire d'amour (telle l'aubépine) éclose aux crocs des plaies.
Au coin, un cierge veille. D'entre la nuit bleue l'ange s'est montré. Or, il est proche, maintenant, les pennes lilas émergés hors la robe pistache que la main chaste noue au ventre.
Saint Pierre, fardé d'oripeaux rouges et bleus, le nimbe jaune et la barbe pisseuse, de sa plante callue foule les dalles.
Il renie la puissance païenne dont l'or barbare éclate aux pilastres des voûtes.
Routier il va (de fers en fers) jusqu'enfin son crâne au flux sanguin, éclate ! quand lié en croix, il meurt, ses pieds, bleus et joints, roidis vers le ciel.
[ 1 ] Remplace : ma.